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Les élections municipales aux Pays-Bas sont devenues une raclée pour le gouvernement actuel.

À J-3 des élections municipales en France, les Néerlandais aussi ont voté pour leurs assemblées locales. Avec des résultats surprenants, voire historiques.

C’est avant tout une raclée pour le gouvernement actuel. Après un an et demi au pouvoir, la coalition VVD (libéraux) et PvdA (travaillistes) perd dans quasiment toutes les villes où ces partis présentaient des listes. Le PvdA perd même Amsterdam, son fief historique, où il a eu le pouvoir sans interruption depuis presque un siècle. Les grands gagnants, dans les 403 communes que compte le royaume, sont les Démocrates ’66, le SP (extrême-gauche) et les partis locaux. Les démocrates de D66 auront 16 sièges (+9) sur 45, tandis que le PvdA en aura 9 (-6). Une défaite éclatante.

Démocrates ’66

À part Amsterdam, D66 gagne surtout dans les grandes agglomérations et les villes universitaires, dont La Haye, Utrecht, Groningen, Haarlem et Leiden. Le D66 a été fondé en 1966 en réaction au manque de démocratie aux Pays-Bas. Il fut en quelque sorte un prélude à ‘mai 68’. Ce parti n’a pas d’équivalent en France. C’est un amalgame de progressistes, sociaux-démocrates, sociaux-libéraux et écolos pro-Europe. Au Parlement européen, le D66 est certes dans le même groupe que le Modem, (l’ADLE) mais, en réalité, ces deux partis n’ont pas grand chose en commun. Le succès de D66 pourrait signifier que les Néerlandais en ont assez de la polarisation et de la radicalisation qui dominent la vie politique depuis la fin du 20e siècle. Par ailleurs, les démocrates ne sont pas les seuls à gagner : le SP (l’équivalent du Front de Gauche) a quasiment doublé le nombre de ses sièges.

Xénophobie

Le parti populiste PVV ne participa au scrutin que dans deux villes, à La Haye (500.000 habitants) et dans la ville-dortoir d’Almere (200.000 habitants). À Almere, il reste le plus grand, mais à La Haye, la capitale administrative du pays, c’est D66 qui a gagné de justesse. Lors d’un rassemblement électoral hier soir à La Haye, le leader (et seul membre) du PVV, le peroxydé Geert Wilders, demandait au public s’ils voulaient « plus de Marocains ou moins de Marocains aux Pays-Bas et dans cette ville ». Le public a répondu en masse : « Moins ! Moins ! Moins ! ». Wilders a répondu : « Ok, nous allons nous en occuper ». Ses remarques ont suscité beaucoup de réactions négatives, également de la part des politiques. Ce discours xénophobe a laissé ‘un goût amer’ au Premier ministre Mark Rutte, qui collabora avec Wilders lors de son gouvernement précédent. Peu après minuit, Wilders persiste et signe: « Que ceux qui me critiquent, dégagent » fut sa défense. L’agence de presse allemande DPA compare Wilders aujourd’hui à Joseph Goebbels et son discours de 1943 où il demanda : ‘Wollt ihr den totalen Krieg ?’, voulez-vous la guerre totale ? Ce matin, plusieurs personnes avaient porté plainte pour discrimination et incitation à la haine et à midi une page Facebook ‘Je porte plainte contre Wilders’ comptait déjà 23.000 ‘likes’.

Partis locaux

L’ascension des partis locaux, un phénomène inconnu en France, constitue une autre grande surprise. Ce sont des partis sans aucun lien avec les partis nationaux et qui défendent surtout les intérêts locaux. Ainsi à Rotterdam, 2e ville du pays, Leefbaar Rotterdam (28,2% des voix) est devenu le plus grand. Partout dans le pays, ils obtiennent presque 30 pour cent des voix. Les partis locaux ont vu le jour à partir du milieu des années 1990. Aujourd’hui, il y en a plus de 1.000 et ils gouvernent déjà un grand nombre de villes. Autre curiosité : pour la première fois dans l’histoire du SGP, un parti chrétien-fondamentaliste qui souhaite que la Bible devienne la loi officielle, une femme a été élue. Elle siégera au conseil municipal de Vlissingen, une ville portuaire dans le sud du pays.

Pour ces municipales, l’abstention a été de 46,2%, un record historique et de +0,1 par rapport à 2010. Vu les caractères très différents des paysages politiques néerlandais et français, il est difficile de tirer des conclusions pour une prévision sur les municipales en France, dimanche prochain. Mais comme les Pays-Bas font souvent office de laboratoire politique pour le reste de l’Europe, les partis français pourraient s’inspirer des résultats surprenants d’hier au plat pays pour avoir une idée de la politique de demain.

Le leader de D66, Alexander Pechtold, prend un ‘stemfie’, un selfie dans l’isoloir, hier aux Pays-Bas:

 

Photo: Affiches électorales à Utrecht © harry_nl / Foter / CC BY-NC-SA

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